Revivez la table ronde du 8 mars : Le sexisme dans la danse, paroles et perspectives

09 mars 2025 - Communiqué

Ce 8 mars, à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, la Fédération Française de Danse a organisé une table ronde essentielle sur le thème du sexisme dans la danse.


S’ancrant dans une journée forte en engagement, cette rencontre s’est tenue au sein de la salle du conseil de la Mairie du 9ᵉ arrondissement de Paris, réunissant des intervenantes et intervenants engagé·es pour échanger sur les inégalités et violences sexistes qui persistent dans le monde de la danse.

 

 

Inégalités et violences sexistes : des réalités persistantes dans la danse


 
Ce milieu artistique et sportif n’échappe pas aux inégalités de genres ni aux multiples formes de violences sexistes qui traversent la société. Lola Bertet, Lola Rudrauf, Anne Loyale et Christophe Clauzel ont ainsi pu débattre de thématiques majeures : les stéréotypes de genre enracinés et leur influence sur les attentes corporelles, les violences physiques et psychologiques, ainsi que les inégalités structurelles freinant l'accès aux opportunités et à la reconnaissance professionnelle. 


Pour Lola Bertet, journaliste et Lola Rudrauf , danseuse, toutes les deux à l’origine du podcast « À Corps Perdus » : « La plupart des danseur·ses sont intermittent·es, ce qui est un statut précaire ». Par conséquent « si on parle et si on sait qu'on a parlé, on risque de ne pas se faire embaucher ou rester dans la compagnie où on travaille ». Le système est tellement précaire que les rapports de pouvoir sont très forts. 

 

Par ailleurs, le silence est omniprésent dans le milieu de la danse, un phénomène que déplore Anne Loyale, militante du collectif Matières Vivantes, engagé dans la prévention et la sensibilisation aux violences sexistes et sexuelles dans les danses sociales. Selon elle, ce silence est en partie lié au poids de la "culture du viol" dans la société. « Les femmes ont tendance à minimiser ce qu'elles ont vécu, notamment à cause du traumatisme et de l'état de sidération qui altèrent physiologiquement la zone du cerveau responsable du langage, celle qui permet de nommer les choses. C'est pourquoi il est essentiel d'encourager la solidarité et l'écoute, de leur rappeler qu'elles ne sont en rien responsables et qu'un accompagnement est possible. »

 


Normes corporelles et dynamiques de pouvoir

 

Cette discussion a aussi permis d’aborder plusieurs problématiques cruciales :  la question du pouvoir et de l’autorité au sein des écoles et compagnies, ainsi que les dynamiques spécifiques à la danse qui peuvent favoriser les violences - notamment à travers la compétition des corps, l’exigence de performance et le rapport au contrôle. 


Pour Lola Bertet et Lola Rudrauf, la critique est constante sur le corps de la danseuse car « notre corps est un instrument de travail », donc il doit rentrer dans des schémas : les normes corporelles requises aujourd’hui restent « d’être mince, élancée, blanche, et jeune » . Par ailleurs, « on va demander aux petites filles d’être parfaites techniquement, alors que pour les petits garçons, ce n’est pas grave, on va dire qu’ils ont de la créativité, de la personnalité… » Que l'on fasse du classique et du contemporain, la danseuse va donc particulièrement être vulnérable aux troubles du comportement alimentaire.

Dans le milieu des danses sociales, selon Anne Loyale, « on a exactement les mêmes codes alors que c’est du loisir et qu’il n’y a pas d’enjeu professionnel : il y a une grande discrimination, très peu de femmes en surpoids ou âgées se font inviter alors même qu’elles sont d’incroyables danseuses ».

 
Christophe Clauzel, premier vice-président de la Fédération Française de Danse, témoigne du projet « CorpsResponDanse » lancé par la Fédération et visant à interroger les normes corporelles dans le milieu de la danse. Il ajoute : « j'ai retrouvé des danseuses revenir de leur premier bal en pleurant car elles n'avaient pas été invitées. Chaque année, j'organise donc le bal des timides : l'objectif est d'inviter des personnes que l'on ne connaît pas et que l'on va pouvoir faire danser ! » 
  
Une attention particulière a été portée sur la responsabilité des institutions : comment former et sensibiliser aux violences sexistes et sexuelles ? Comment repenser les normes en place pour redéfinir les cadres d’apprentissage ? Enfin, quelles mesures concrètes doivent être mises en œuvre, tant pour prévenir que pour réagir face aux violences ? 

 

C’est dans l’objectif de réduire les inégalités de carrière que Christophe Clauzel explique : « Aujourd’hui, chaque fédération doit garantir la parité au sein de son comité directeur et de son bureau exécutif. À la FFDanse, toutes les disciplines sont représentées à la Direction Technique Nationale par deux conseillers techniques, un homme et une femme. »

 

 

Agir pour un environnement plus respectueux : les initiatives
 

Face à ces constats, un message fort a émergé : le monde de la danse ne peut perpétuer des mécanismes de domination et d’inégalité et doit s’engager activement. 


Anne Loyale souligne que le collectif Matières Vivantes agit concrètement lors des festivals de danse, en déployant une caravane pour recueillir la parole des victimes, la valoriser et la diffuser. Le collectif mène également des actions de prévention en amont, telles que des stages de théâtre forum (par exemple : « savoir arrêter une danse en cours de route quand cela devient inconfortable »). 


Christophe Clauzel rappelle aussi certaines des mesures déjà prise par la Fédération Française de Danse : pour exemple, « la danse same sex et l'equality danse, [avec des rôles de leader et de follower qui ne sont pas assignés à un genre] : changer de rôle, c'est aussi une approche technique très bénéfique au danseur. Le résultat y est, et ça commence à fonctionner dans les mentalités. »

 

Ainsi, la FFDanse poursuit son engagement en proposant des initiations à l'equality danse et en organisant des compétitions, comme le « Rendez-vous de Paris ». Depuis 2024, la Fédération a renforcé ses mesures de prévention des violences sexistes et sexuelles (VSS) : elle vérifie chaque année l’honorabilité de ses encadrant·es, a mis en place une commission VSS, élaboré un plan d’action dédié, et intégré une sensibilisation aux VSS dans toutes ses formations (professeur·es, encadrant·es, juges, bénévoles). Elle recrute également chaque année un·e volontaire en Service Civique pour développer et déployer ces actions sur le terrain. À travers ces initiatives, la FFDanse réaffirme sa volonté d’instaurer des mesures concrètes pour garantir un environnement plus inclusif et respectueux pour toutes et tous. 

 


Enfin, ces échanges coordonnés par Yasmina Benbekaï ont souligné l’importance d’une mobilisation collective et durable. C’est ainsi que, dans la continuité de ces réflexions, s’élève l’espoir d’une danse libérée des stéréotypes de genre et porteuse d’égalité. 




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